[Report] Une foule poings levés face à Damien Saez au Zénith de Paris
24 avril 2017 à 21h00 par Angèle Chatelier
Nous y étions.
Il est celui que l'on adore détester, que l'on hait sincèrement, ou que l'on encense. Presque vingt ans après Jeune et Con, Damien Saez le libertaire, l'amoureux de Victor Hugo, a offert à des milliers de convaincus une prestation étourdissante samedi 22 avril 2017, au Zénith de Paris.
"Merci d'être si fidèles" termine Damien Saez presque 4h30 après le début de son concert. Sur les notes encore sépulcrales de ses musiciens, il regarde intensément la foule, le poing levé. Il trinque, s'allume une clope, s'assoit, puis se relève. L'homme vient d'offrir une prestation édifiante, brassant ballades saisissantes, rock contestataire et courts-métrages : son Manifeste. Il est celui qu'on adore ou qu'on déteste mais samedi 22 avril 2017 au Zénith de Paris, il est celui que l'on respecte.
L'artiste est revenu, trois ans après l'opus Miami avec Le Manifeste, sorte de concept-album, une "poésie résistante" en trois actes. Le premier s'appelle L'Oiseau Liberté, dont il dévoile quelques titres dès le début de son spectacle, encore emmitouflé dans son gilet en laine marronâtre. Il est assis sur une chaise, les yeux rivés sur un pupitre, ses doigts dansant sur son piano ou sa guitare. Le ton est donné : "Ils étaient des sourires, ils étaient des sanglots, ils étaient de ces rires que font les chants d'oiseaux". Certaines larmes cathartiques s'échappent - déjà - d'yeux sensibles. D'autres hurlent. Les briquets s'allument, les flammes semblent représenter les 130 victimes de ce "vendredi noir", de ces "amoureux qui se sont blottis l'un contre l'autre à deux contre la tyrannie". Le chanteur entonne Les Enfants Paradis, un titre hommage aux victimes des attentats du 13 novembre. Ce sera cependant l'une des seules ballades du concert.
https://twitter.com/Cacahuetine/status/856182742064783360
- Un anticonformiste
Mon métier n'est pas de nourrir une machine que je n'aime pas, sous prétexte que ça me fera vendre. Ma trace est peut-être modeste, mais c'est la miennePlus généralement, Saez est un insatiable mécontent. Un criard, dénonçant la société de consommation, les gens qui "parlent mal, les gens qui sont cons", les "OGM dans les biberons" dans J'accuse. Le fait que l'on soient tous "rien de rien, que du vide que du vent" dans Pilule. Titres qui, dès les premières notes, font hurler la salle, soulèvent les gens assis, et font lever les poings, aussi. https://twitter.com/savoye13/status/854993414181597188 Force est de constater que Damien Saez va bien au-delà de la mélancolie. Ce soir-là au Zénith, il est las, rompu. Avec lui, nous sommes des résistants. Il enchaîne ce qui sont des tubes, pour les plus fidèles : Messine, Fin des mondes, Les échoués, Betty, puis Je suis. Le chanteur devient parfois un poète messager, tient une feuille blanche. A un moment, il lit sa Lettre à Politique : "A ta santé Fillon ! A ta santé Macron !" scande-t-il après une tirade de dix minutes, à la veille du premier tour de l'élection présidentielle. Il enchaîne avec Mon Terroriste, face à une foule pogotante. Hurlante.
Il est pas beur ou maghrébin, pas pakistanais ni indien, mon terroriste. Il est plutôt vachement français, du genre courtier costume banquier, mon terroristeAssorti de ses six musiciens (dont un accordéoniste), il captive avec ses plus grands succès : Ma petite couturière, Marguerite, Rue de la Soif - son dernier titre. Il parle de son amertume, de ses crachats à la gueule des loups les plus voraces, mais aussi de celles qu'il a aimées.
- La dictature de l'amour
- "Allume la salle, j'veux voir mes p'tits potes"